Vous avez mon engagement total à maintenir la qualité, l’éthique et les exigences auxquelles nous croyons tous.
Souvenez-vous, il y a quelques semaines, je publiais le premier volet des articles relatifs à la presse et à ses acteurs, et je citais comme exemple – à suivre – le slogan mis en exergue par le célèbre quotidien américain, le Washington Post – ou le WaPo -, : « Democracy dies in darkness« , ou « La démocratie se meurt dans l’obscurité ». Ce slogan, affiché sur la première page en 2017, était une réaction à l’administration Trump.
Nous ne sommes jamais surpris. Hélas. Tout s’enchaîne de manière cohérente pour les bienfaiteurs du candidat mono-neuronal à l’élection présidentielle américaine.
Il ne suffit pas de se dissimuler derrière un slogan, il faut s’y tenir.
Dans un contexte de déchirements internes, sans retours envisageables, de la plus grande puissance économique et militaire, le fondateur d’Amazon – propriétaire du WaPo – choisit la fuite et de courber l’échine. Il privilégie la complicité – voire la collaboration avec sa connotation négative – au combat de valeurs.
Les dirigeants des plus grandes entreprises manquent de courage, ou agissent sournoisement, pour avoir au pouvoir des hommes et des femmes politiques à leurs bottes qui installeront un système politique, judiciaire, sécuritaire et économique qui accroîtront encore leurs richesses.
En face de ce pouvoir – celui de l’argent et de la corruption – avons-nous une équipe de journalistes compétents, obstinés, courageux qui s’opposeront à la logorrhée de bien des supposés représentants du peuple ? Et nous ? Allons-nous nous taire comme à d’autres époques nauséabondes ?
crédit photo : José Martín Ramírez Carrasco
… dans la cupidité
Billet du compte Threads Beingliberal
Tout récemment, le propriétaire multi-milliardaire du journal, Jeff Bezos, a décidé – contrairement à la ligne éditoriale des dernières décennies – de ne pas prendre parti pour un ou une candidate aux élections présidentielles. Au même moment, des cadres de l’entreprise de presse rencontraient Donald Trump. Coïncidence… ?
Jeff Bezos est la deuxième personne la plus riche du monde derrière Elon Musk, et il est devenu un soutien important de la campagne de Donald Trump pour une deuxième présidence. Il a acheté le Washington Post en 2013 pour 250 millions de dollars. En 2016 et en 2020, son journal appuyait respectivement les candidatures d’Hillary Clinton et de Joe Biden. Pour mémoire, le quotidien a toujours soutenu un candidat depuis les années 1970 et l’affaire du Watergate, portée par ses journalistes Bob Woodward et Carl Bernstein, a contribué à la chute du président républicain, Richard Nixon.
Lorsque l’on comprend que des multimilliardaires comme Jeff Bezos, Elon Musk, Peter Thiel, aux États-Unis, ou Pierre-Édouard Stérin et Vincent Bolloré, en France, soutiennent des agendas conservateurs, saturés de principes religieux, pour mieux revenir en arrière, mais surtout en quête de complices de baisses d’impôts, on ne s’étonne guère. Chacun a le droit de se tenir dans son camp de réactionnaires ou de conservateurs, chacun a le droit d’avoir ce type de valeurs. Cela a toujours existé.
Nous n’avons pas attendu le 21ème siècle pour découvrir les influences, les réseaux, les groupes de pression, principalement des plus grandes fortunes, des acteurs économiques les plus puissants. Meilleur argument jusqu’ici – mais singulièrement éculé – : le chantage à l’emploi. Les chefs d’entreprise ont leurs obligés politiques. Ils les ont toujours manipulés. On peut déplorer, en France, qu’aucun courant politique au pouvoir ne déroge aux vieux principes rances et aux réflexes pavloviens.
Ce qui se joue ici est autre. Au-delà des cadeaux fiscaux et des crèches installées dans le hall des mairies, il y a cette cupidité, cette obsession sans fin de rafler l’argent public, cet argent que nombre d’entre eux considèrent comme gaspillé lorsqu’il est attribué aux citoyens ordinaires mais qui sied bien au teint de leurs amis et des membres de la famille.
Au-delà de ces bonus, ces dirigeants et/ou propriétaires d’entreprise cherchent à instaurer une forme d’autocratie, un État sécuritaire et autoritaire, pour imposer leurs bons vouloirs, pour enfin faire ce qu’ils fantasment. Moins de règles, voire aucune, pour baisser les salaires déjà bas des travailleurs pauvres, pour porter atteinte à la vie des femmes sur des idées obscurantistes, pour priver d’aides sociales et de soutien médical celles et ceux qui n’ont pas pu tirer profit du système américain, pour en définitive – parce qu’ils vivent dans des îlots dorés – se gaver.
Ceux qui crient au libéralisme sont les chantres de la concentration économique. On leur recommanderait bien de revenir aux études ou d’ouvrir un livre de sciences économiques.
Dernière lubie pour les chefs d’entreprises américains, démocrates ou républicains ? Se débarrasser de Lina Khan, présidente de la Commission fédérale du commerce, celle qui est censée réguler les marchés et surtout éviter les concentrations de pouvoir et de richesses aux mains de quelques-uns. Tous les milliardaires politiquement impliqués, les démocrates comme Reid Hoffman, Barry Diller et Mark Cuban, et les républicains comme Elon Musk, ont demandé le départ de Lina Khan. C’est dire comme elle doit bien faire son travail !
… dans la couardise
Voici ce dont il s’agit : ces hommes multi-milliardaires – se présentant et se représentant comme des mâles alpha – se courbent et plient devant les intimidations et les menaces d’un seul homme et de son équipe du projet 2025, élaboré par le très conservateur laboratoire d’idées Heritage Foundation, dont s’est rapproché notre actuel Président du Conseil de l’Union européenne, Viktor Orbán.
Après la contradiction sur leurs idées libérales – non, messieurs, vous n’y êtes pas – voici celle de leur supposée domination sur les autres. Le problème pourtant est que dans un groupe, il ne peut y avoir qu’un seul mâle alpha. On imagine d’ailleurs que, selon les événements à venir, il risque d’y avoir des combats de testostérone.
Rachel Maddow – Mardi 29 octobre 2024 – billet sur Threads
Je ne suis certes pas une experte en psychologie de l’homme moderne, mais il y a là une dynamique personnelle que je ne comprends pas. Tous ces hommes se considèrent comme des chiens alpha, non ? Mais ils acceptent avec empressement d’être dominés par cet autre homme ? Aucun d’entre eux – littéralement aucun d’entre eux – ne se hérisse, ne recule et ne pique une crise en réponse aux menaces de ce type ?
Entretemps, il y a toujours trop de chroniqueurs, de prétendus experts et de journalistes à se gausser devant le spectacle cauchemardesque que présentent Donald Trump et ses sbires, ses obligés. Alors que la haine de l’Autre, les femmes, les juifs, les noirs, les musulmans, les homosexuels, les transexuels, les handicapés – bref, tout ce qui ne ressemble pas à une chose dégarnie, grasse et luisante – explose d’heure en heure au fil des meetings de cet entrepreneur autoproclamé, les commentaires tièdes et misogynes se concentrent sur la candidate démocrate, Kamala Harris.
Dans ce contexte de menaces pour nos démocraties, outre-atlantique et en Europe, nous devons être exigeants avec nous-mêmes. Nous devons croiser les informations dispensées par des journaux ou des chaînes de télévision qui, eux aussi, ont leurs intentions plus ou moins cachées.
Sur certains plateaux de télévision notamment d’information en continu, si l’on peut apprécier une ligne éditoriale tournée vers la sphère internationale et les conflits, qui devraient tous nous concerner, il y a cette impression malaisante de réaliser que des hommes et des femmes politiques d’extrême-droite sont devenus des chroniqueurs réguliers. De ces chaînes par ailleurs, il suffisait d’écouter la complaisance de certains animateurs de plateaux avec les représentants de l’extrême-droite lors des dernières élections législatives, leur incapacité à rebondir sur les énormités et les fausses informations proférées. On ne sait distinguer alors la lâcheté de l’incompétence.
Dorénavant, les canaux d’information ne sont plus vraiment la presse écrite mais, pour beaucoup de personnes de toutes générations, les réseaux sociaux qui enclenchent avec leurs algorithmes la danse du hamster dans sa roue. Les complotistes sont ainsi bombardés d’informations qui les confortent dans leurs biais. Le principe de la rumeur ou des fausses informations n’est pas nouveau, il est simplement amplifié par l’internet, par les réseaux sociaux et la mainmise, pour des intérêts évidents de rapports de force, de pays étrangers sur nos systèmes politiques démocratiques, parfois avec la complicité de nos concitoyens.
La lâcheté ne concerne pas les seuls acteurs économiques, personnalités publiques et journalistes. Elle nous concerne tous. Si vous lisez régulièrement mes articles, j’insiste souvent sur notre incapacité à sortir de nos biais, de notre tendance spontanée de raisonner autour de notre nombril ou de notre groupe familial, social, religieux ou non, bref autour de ce qui nous ressemble. Nous avons perdu – si tant est que nous les possédions – cette curiosité de l’autre, cette indulgence, cette ouverture d’esprit qui ne nous demandent pas de vivre comme les autres mais qui nous permet de vivre avec les autres.
Pendant ce temps, nos médiocres hommes politiques copient le modèle outre-atlantique et se répandent en propos élogieux sur la politique illibérale de Javier Milei, président de l’Argentine, ou en fausses informations contre les faits qui leur sont présentés sur le plateau de télévision de l’émission C à vous, face à Patrick Cohen, journaliste pugnace et qui bosse.